Nicole Bouquet Mikolo, à l’occasion des Traversées Mauritanides 2022

« La littérature féminine ou plus précisément la littérature dans les pays africains faite par des voix féminines. Cela tout de suite fait penser à ce que davantage que dans les autres parties du monde il y a nécessité de marquer des particularités.
Des particularités causées par les sociologies même des différents pays africains et leurs histoires. Oui, les femmes n’ont pas la part belle et c’est un truisme de le dire dans les sociétés africaines parce que ces dernières sont patriarcales. Parce que, par le fait de la colonisation, un déséquilibre s’est creusé entre le pouvoir accordé aux hommes dans les sociétés et celui dévolu aux femmes.

La littérature qui est donc le terrain d’expression de toutes les photographies de tous les lieux et de tous les humains, va suivre ce même mouvement.
C’est de cette façon que l’on sait qu’au Cameroun les voix des femmes sont récentes en littérature. On songe ici aux premières femmes qui ont écrit : Charlotte Mbarga Kouma, Ngo Matip, Evelyne Mpoudi Ngolé, Were Were Liking, Frieda Ekotto, Thérèse Kuoh Moukouri, Marie-Thérèse Assiga Ahanda, Lydie Dooh Bunya et tant d’autres.

Ces voix-là n’ont pas eu la même force, le même retentissement que les voix des plus jeunes au Cameroun. Les voix qui ont retenti sont celles de Calixte Beyala, Leonora Miano, Jeanne Louise Djanga, Hemley Boum, Imbolo Mbue, Nathalie Etoké et plus récemment celle de Djaili Amadou Amal.
Il y a encore lieu de faire un peu de sociologie pour se rendre compte que les plus grandes voix avant celle de Djaili étaient celles du Sud, du Centre, celles de la forêt, de l’Atlantique alors que l’auteur de Les impatientes nous apporte la marque, les voix et les sensibilités de la partie septentrionale du Cameroun, du Sahel.

Les voix féminines ont l’attention de tous ceux qui voudraient bien les écouter
Elles le sont d’ailleurs parce qu’elles le font au même degré que les hommes désormais avec toutes les qualités de littérature les plus exigeantes.
C’est de ça qu’il est question ici avec l’œuvre de Mme Djaïli Amadou Amal, dont certains ouvrages sont inscrits au programme scolaire camerounais et récemment au lycée français de Nouakchott.« 

Voilà mon introduction à la rencontre d’hier entre Djaïli Amadou Amal, (Officier de l’Ordre de la Valeur, actée par le décret du Chef de l’État camerounais, Paul Biya, lauréate du Prix Goncourt des lycéens (2020) Ambassadrice de l’Unicef, Docteur Honoris Causa de la Sorbonne) et le public venu nombreux l’écouter à l’institut français de Nouakchott.

Pendant une heure et 40 minutes, cette semeuse de lumière, pétrie de culture humaniste a parlé de son œuvre, de l’acte de lecture qui l’a conduite vers l’acte d’écriture, de son parcours et de ses projets, de son association Femmes du Sahel, de ses bibliothèques. Le tout, avec mesure, intelligence et finesse, animée par la conviction de défendre une cause juste.

Passionnée, si gentille et toujours prête à servir les autres… Il y a tellement à dire sur cette guerrière pour l’éducation de la fille au Sahel, cette porteuse d’avenir en matière d’égalité de genres, cette épouse, cette mère, cette écrivaine.

C’est un bonheur de l’écouter et pour qui ne peut pas, de la lire.

Infiniment merci à Bios Diallo, qui sait réunir des pépites de la littérature pour le plus grand bonheur de la jeunesse africaine de Mauritanie et d’Afrique. Et pour la réussite des Traversées Mauritanides 2022.

Infiniment, merci.

 

Texte introductif de la conférence de l’écrivaine à l’Institut Français de Nouakchott. Nicole Mballa est une journaliste et écrivaine Camerounaise. Son roman Les Calebasses brisées paru en 2016 aux éditions l’harmattan jette un regard critique sur la place faite aux femmes dans un certain pays d’Afrique.
Elle également auteure de deux œuvres poétiques: L’Etoile est ma demeure et La solitude de l’aigle aux Éditions Renaissance Africaine en France